

Conférence réalisée par
Jean-Marc ONKELINX
Mardi 1er avril 2025
I 1913-1931 NAISSANCE ET JEUNESSE A BASSE POINTE ET FORT DE FRANCE
I LA MORT DE MOZART ET LE REQUIEM.
Ce qui a fait une légende de Mozart, ce sont les circonstances de sa mort, dont les artistes et scénaristes se sont emparés.
La légende raconte qu’un jour un mystérieux messager vint frapper à la porte du compositeur pour lui demander d’écrire une pièce des morts. Il lui offre une bourse pleine d’argent et lui demande de ne pas signer l’œuvre. L’autre partie de la bourse viendrait après la livraison de la commande.
Mais Mozart est très occupé par les répétitions de La Flûte enchantée et il est en train de composer La clémence de Titus pour le couronnement du roi Léopold II.
Il décède avant d’avoir terminé le requiem.
Le masque mortuaire est l’empreinte du visage de Mozart lorsqu’il est décédé.
Mozart a eu un enterrement de “seconde zone”, ce qui correspondait à son niveau social. On raconte qu’après le service funèbre, qui s’est déroulé dans une chapelle de la cathédrale de Vienne, sa dépouille a été emmenée sans présence d’autrui pour être inhumée dans une fosse commune.
Ce qui s’explique par l’épidémie de choléra qui sévissait à l’époque et les mesures sanitaires en vigueur. Mozart est donc parti sans que personne ne le suive, et les corps étaient basculés dans une fosse, le temps que l’épidémie passe. Puis on récupérait le corps pour lui offrir une digne sépulture. Dans le cas de Mozart, l’étiquette identifiant sa dépouille aurait été arrachée. Si quelqu’un a exhumé un crâne en vue d’analyse, on n’est pas sûr de qui est enterré dans sa tombe.
Il y a eu des légendes sur les causes de sa mort, mais l’histoire serait plus banale. En fait, il est mort d’épuisement à 35 ans.
Ce qui a fasciné est qu’il a fallu compléter le requiem, qui n’avait pas été fini par Mozart, sous peine pour sa veuve, de devoir rembourser l’acompte.
C’est un de ses élèves, Franz Xavier Süssmayer qui s’en chargera.
Il avait commencé à écrire le requiem : certains morceaux étaient achevés, d’autres partiels.
Mozart s’attacher à rédiger une partition sans rature.
Le lacrimosa termine sur un éclat de lumière, les larmes sont transformées dans une grande espérance, échelle céleste (gamme qui monte vers l’aigu) et finit en s’étirant. C’est François-Xavier Süssmayer qui fait le raccord, et si on ne connait pas l’endroit où Mozart s’est arrêté de composer, on ne sait pas que ce n’est pas de lui.
Autre légende: le commanditaire mystérieux du requiem était en fait un aristocrate viennois qui aurait voulu se faire passer pour le compositeur de la messe (en hommage à sa femme disparue en 1792), mais cela a fuité. C’est parce que la veuve de Mozart veut récupérer la bourse qu’il recevra la partition terminée.
Donc Mozart n’est pas mort empoisonné, mais probablement d’une insuffisance rénale. Il n’est pas mort en écrivant la partition du requiem (iconographie vaste qui a entretenue la légende). Il était parti à Prague pour continuer La clémence de Titus, et pensait terminer la messe à son retour.



II LA PETITE MUSIQUE DE NUIT
La petite musique de nuit a été composée par Mozart en 1787. Cette sérénade KV 525 est le symbole de la musique classique, une des grandes œuvres les plus célèbres. Sa notoriété est liée à la mélodie, non à un savoir du contenu de l’œuvre.
Une enquête la met en premier lieu devant le boléro de Ravel et Carmen.
Sa notoriété égale celle de la Joconde de Léonard de Vinci : cela aurait fait plaisir à Mozart. On raconte que lorsqu’il se promène dans les rues de Prague, lorsqu’il écrivait La clémence de Titus, il rencontre un vagabond qui fredonne un air des Noces de Figaro. A la question: qu’est ce que vous chantez, le monsieur répond: “je ne sais pas ce que c’est, mais c’est une belle musique” ce qui réjouit Mozart.
Pourquoi la Petite musique de nuit a continué à être célèbre: c’est parce qu’elle n’a pas cessé d’être jouée, arrangée. Cette sérénade, comme La Joconde, a été “mise à toutes les sauces”. Malgré les transformations, on la reconnait (exemple de l’interprétation par les Swingle Singers).
Analyser la petite musique de nuit sert à montrer qu’elle est parfaite.
Mozart avait le génie de l’opéra: extrait de La flûte enchantée, 2ème acte. Superbe interprétation par la soprano Roberta Peters.
La reine de la nuit descend tendre un couteau à sa fille pour tuer Sarastro, qui l’a enlevée. Mais celle-ci ne veut pas.
Mozart écrit un seul morceau pour montrer les deux aspects d’une même personne: d’abord un air de colère, tempétueux, qui passe du suraigu au grave, puis un jeu de vocalises qui demandent une virtuosité impressionnante: c’est l’air de la séduction.
On passe de l’effroi à l’émerveillement. Ce passage traduit la psychologie du personnage; la note de contre fa est l’une des plus aigues.
C’est la fonction rhétorique et dramatique de la musique.
Mais où Mozart a-t-il appris cela? Pas à Salzbourg, où il n’y avait pas d’opéra.
III FORMATION ET ECLOSION D’UN GENIE
L’archevêque de Salzbourg est assez prospère (grâce au sel). Sigismond Schrattenbach est généreux et aimé. Il pense que les êtres humains peuvent progresser grâce à la culture et il a son propre orchestre dirigé par Léopold Mozart, le père d’Amadeus.
L’archevêque se rend compte du génie des enfants Mozart, Wolfgang et sa sœur Maria Anna (mais les femmes à l’époque n’avaient pas le droit de composer).
Léopold se trouve démuni pour continuer la formation de ses enfants. Il envisage de faire le tour de l’Europe. L’archevêque décide de maintenir le salaire de Léopold pour qu’il puisse voyager, et faire ainsi la publicité de Salzbourg.
La famille se produit dans tous les salons; ils sont applaudis. Mozart a 7 ans.
Mozart écrit ses premières œuvres pour violon (instrument de son père) et clavecin (joué par Wolfgang).
De retour à Salzbourg, le père et le fils repartent à travers les villes italiennes. Sa sœur et sa mère ne sont plus du voyage.
Mozart donne des cours à Bologne, écrit des opéras. A 12 ans, WA Mozart reçoit une médaille du pape pour service à la chrétienté.
Lors de sa visite à la chapelle sixtine, il est resté des heures en admiration devant le jugement dernier de la chapelle sixtine. Il entend le Miserere de Gregorio Allegri, chant religieux baroque, un peu grégorien, célèbre morceau non publié, qui dure un quart d’heure. Quand il rentre le soir, 5 heures plus tard, il est capable de réécrire entièrement la pièce.
Le génie de Mozart est essentiellement un génie de mémoire: la “super audition”.
En 1791, il écrit la Flûte enchantée d’abord dans sa tête ((500 pages dans la partition d’orchestre); ce qui lui prend du temps : recopier.




Puis l’archevêque de Salzbourg vient à mourir. Haydn écrit un requiem (sa famille était proche du prélat) pour les funérailles. Mozart l’écoute quatre fois : la lumière éternelle.
On y trouve dedans un motif qui sera repéré vingt ans plus tard dans le requiem de Mozart; motif similaire dans la symphonie n°25.
Il y a des filiations chez Mozart qui montrent qu’il y a un amont dans sa musique (filiation avec Haydn et d’autres), et qui ont alimenté son inspiration.
Hieronymus Colloredo est le nouvel archevêque.
Pour lui, le musicien est un laquais. Mozart écrit des œuvres commandées. Il s’exerce à écrire de la musique religieuse, tel l’offertoire : Misericordias Domini, K 222 , en 1775.
Il travaille sur une chorale (thème de l’hymne à la Joie que Beethoven écrira des années plus tard). Mozart fait partie de la filiation de Beethoven : en effet , quand Mozart meurt, Haydn ne peut le remplacer ,on “mise” sur Beethoven. Haydn possédait les partitions de Mozart, qu’ils ont regardées ensemble. C’est là que Beethoven l’a découvert. Ce n’est pas considéré comme du plagiat. Beethoven en a fait un thème principal, alors que chez Mozart ,le thème n’était qu’en filigrane.
Mozart est agacé de composer uniquement de la musique religieuse. Il veut écrire de l’opéra. Il va trouver l’archevêque, mais celui-ci est fâché. Léopold comprend que son fils repartira. Léopold reste pour garder son poste, Wolfgang, en partant avec sa mère, perd le sien.
IV RECHERCHE D’UNE EMANCIPATION
Lors de son voyage, Mozart rencontre à Mannheim la cantatrice Aloysia Weber. Ils tombent amoureux et se promettent le mariage. Mais son père enjoint Wolfgang d’aller à Paris, en passant par Strasbourg.
A Paris, Mozart ne trouve aucun travail. C’est désormais un adolescent, le prodige attire moins que lorsqu’il était enfant. Il se souvient d’une scène où Marie Antoinette l’avait aidé à se relever lors d’une chute, et écrit en 1778 un concerto pour flûte et harpe, la reine jouant de cet instrument. Mais bien que ce soit une œuvre mémorable, un des tous premiers adagios où on “décolle”, (elle restera la seule que Mozart écrira pour la harpe), Marie Antoinette n’en aura pas connaissance.
La seule commande qu’il a est une symphonie dite “parisienne”.
Sa mère décède en quinze jours de temps après être tombée malade. Elle a des funérailles modestes. Wolfgang écrit à son père pour l’informer du décès.
Léopold plaide la cause de son fils auprès de l’archevêque. Mozart revient à Salzbourg, sa fiancée en a épousé un autre.
L’archevêque lui commande une messe pour le couronnement de la vierge Maria Plain. Ce credo : Et incarnatus est K 317, par ses couleurs funèbres, a des allures de requiem, en souvenir de sa mère prénommée Anna Maria.
Puis Mozart va monter un opéra à Munich pendant trois semaines. Il ne vient pas à Vienne animer les réceptions que l’archevêque a prévu.
Mozart n’a plus envie , il est triste. Il rencontre l’ambassadeur, le conte d’Arco, qui lui signifie son «licenciement” – “Désormais, je suis libre…”
.



V LA LIBERTE CREATRICE
S’il est libre, Mozart n’a plus de mécène. C‘est le premier compositeur « indépendant”. Il gagne de l’argent, mais le dépense. Il confie des rôles à son ex fiancée et va épouser sa sœur Constance avec laquelle il aura deux enfants à Vienne, les autres n’ayant pas survécu. Léopold se désole de cette situation.
L’empereur Joseph II a entendu parler des œuvres de Mozart. A sa cour, il n’y a que des musiciens italiens.
Antonio Salieri, maître de chapelle de l’empereur, n’est pas aussi méchant que les films ont pu le laisser croire.
Joseph II reçoit Mozart et se propose de lui commander une pièce en allemand. Le sujet est imposé: L’enlèvement au sérail .Le rôle de l’héroïne sera confié à Aloysia Weber. On sent la clémence humaniste de Mozart dans cette œuvre, il préfère pardonner que punir.
Ce seront les “turqueries”: sonate en la majeur K 331 III Alla Turca (la marche turque a été composée à l’époque). Le piano de Mozart n’avait pas le même son à l’époque.
Mozart rencontre de plus en plus le milieu intellectuel. Le baron lui fit découvrir la musique de Jean Sébastien Bach. C’est l’époque des grands concertos.
Mozart est approché par la franc-maçonnerie, car il a une « connaissance ». Il y rentre, se réconcilie avec l’idée de la foi, et avec l’archevêque.
Mais les pouvoirs royaux et de droit divin se méfient de la franc maçonnerie. Joseph II, qui en a les idées, l’interdit car a peur que cela donne des idées révolutionnaires.
Mozart, dans les noces de figaro, montre la révolte du milieu populaire face à l’aristocratie. Mozart va initier son père à la franc maçonnerie. Il écrit une lettre d’une grande maturité à son père mourant qui décèdera en 1787.


Le reste de son œuvre sera inspiré par la franc-maçonnerie: la tonalité est particulière, c’est une musique d’une grande élévation: cors, balancements, hautbois, clarinettes, couleurs musicales que l’on associe à la franc maçonnerie. C’est une forme contemplative de la musique de Mozart. Le concerto pour clarinette (instrument prisé par la franc-maçonnerie) est d’une beauté rayonnante. Il se dégage de toute tragédie, retrouve la plénitude.
L’année 1791 est une année prolifique: la même musique va se retrouver dans trois oeuvres:
- La flûte enchantée
- La clémence de Titus
- L’adagio maçonnique, pour trois cors de basset K 580, musique destinée à la
loge, même thème que pour l’Ave Verum Corpus K 618, composé en 3/4 d’heure. Cette musique religieuse évoque le Christ (et non plus Dieu). Le rapport entre le Christ et l’homme est plus humain.
On retrouve ce même humanisme dans la flûte enchantée K 620 acte 2 Chœur Isis et Osiris.
Un théâtre populaire est tenu par les francs-maçons: idée que chacun devait pouvoir aller au spectacle pour y voir des œuvres divertissantes, émouvantes et pouvant enseigner la tolérance, l’ouverture d’esprit. Initiation philosophique, éducation, lutte des ténèbres contre la lumière: c’est la bienveillance. Le monde continue à être dans la lumière.
Le rôle de Sarastro dans la Flûte enchantée, est écrit pour une voix basse et profonde (extrait d’une interprétation par Martti Talvela, basse finlandaise).Il représente la sagesse, la lumière, l’autorité bienveillante. Il s’agit d’un des meilleurs rôles écrits par Mozart.
C’est une synthèse qui s’adresse à tout le monde: la bienveillance est une qualité humaine pour le progrès.


VI LE REQUIEM INACHEVE
Retour au requiem inachevé…
On a deux versions: celle telle que Mozart l’a laissée, et celle complétée par Süssmayer.
Quand Mozart a transformé les larmes en lumière, il n’a fait que transposer les larmes de lumière en bienveillance.
Le propos a été dit : ce n’est pas qu’une messe pour les morts, mais aussi une messe pour ceux qui restent, pour les vivants.
L’essentiel a été dit: le lacrimosa en est la quintessence: il s’agit de transformer le quotidien des hommes en lumière.
L’humain Mozart qui transforme les larmes en lumière, c’est une bonté qui nous fait du bien.
Marie Pierre Fourdinier, le 1/04/2025
UTL Pévèle Carembault